Au début du mois d’octobre 2015, la nouvelle ambassadrice de France Véronique Vouland-Aneini a clairement déclaré que les îles Eparses appartiennent à son pays. Il n’en a fallu  plus pour mobiliser James Ratsima, même si cela fait des dizaines d’années qu’il a lutté pour que l’Hexagone exécute la résolution de l’Organisation des Nations Unies.

Au début de cette revendication, vous aviez souligné ne vous arrêter que lorsque les îles Eparses, ou plutôt les îles malgaches  seront  rendues à Madagascar. Où en êtes-vous aujourd’hui ?

Ceux qui ne suivent pas réellement les évolutions de cette affaire pensent que j’ai décidé de me taire mais c’est loin d’être le cas. Chacun a sa manière de revendiquer les îles situées dans le canal du Mozambique que ce soit les grandes marches ou les manifestations populaires. Nous, moi et mes compagnons, avons délibérément choisi d’éviter d’organiser des manifestations pour la simple raison que les tenants du pouvoir savent très bien comment y remédier. Toutefois, je peux vous dire que nos revendications  ont atteint un niveau plus élevé et si tout se passe comme prévu, nous estimons que les îles Eparses seront officiellement réintégrées au territoire de Madagascar d’ici le mois de juin. Nous obtiendrons et n’abandonnerons pas ces îles quoi qu’il en coûte. Nous demandons juste la patience et la confiance de la population.

A l’heure actuelle, faut-il encore espérer quelque chose des dirigeants par rapport à la revendication de ces territoires malgaches ?

Depuis des années, je n’ai cessé de scandé que toutes les îles proches de nos côtes appartiennent naturellement à Madagascar. Toutes ces petites îles où les malgaches n’ont même pas le droit de poser un pied sur la plage parce qu’elles ont été vendu et/ou deviennent des plaques tournantes du trafic de drogue. Ce sont pourtant des patrimoines malagasy et cela signifie qu’ils nous appartiennent. Mais tous les dirigeants qui se sont succédé à la tête de l’Etat ont tous oublié qu’ils incarnent la souveraineté nationale et l’intégrité territoriale. Mais le plus étonnant encore, ils organisent des diversions pour masquer et défendre l’occupation de la terre de nos ancêtres par des militaires étrangers. Ainsi, ils se rendent donc complices de ces étrangers et complaisant avec l’intelligence étrangère, soit avec l’ennemi qui boude nos terres tels que les îles Eparses. Autrement dit, les dirigeants sont clairement des traîtres pour Madagascar.

Pour beaucoup, le président de la République protège les intérêts de la France dans cette affaire, raison pour laquelle il esquive toujours la question. Aujourd’hui, vous êtes clairement un obstacle et une personne qui dérange, le régime mais aussi la France. Craignez-vous pour votre vie ?

En réalité, les dirigeants ne supportent pas que de vrais patriotes et/ou nationalistes se soulèvent pour la simple raison que cela a des conséquences néfastes sur leurs intérêts particuliers. Pour cause, certains politiciens malgaches travaillent même pour le quai d’Orsay et se réunissent trop souvent avec des dirigeants français. Depuis que j’ai commencé à revendiquer la restitution des îles malgaches à Madagascar, on m’a toujours taxé de terroriste mais je ne tomberai pas dans ce piège. Les dirigeants peuvent aujourd’hui faire ce qu’ils veulent contre moi. Ce n’est pas nouveau et je vis cela depuis longtemps. Ils peuvent me menacer ou même me jeter derrière les barreaux, ils ont le droit parce que l’autorité leur appartient. Toutefois, cela ne signifie pas que tout le pouvoir se trouve entre leur main parce qu’ils ne sont pas au-dessus de tout dans ce pays. Laissons les agir comme ils le souhaitent, on verra où cela va les mener parce que quoi qu’ils fassent, ils devront partir quand le moment viendra.

Quand  est-ce-que ce moment viendra ?

Je ne peux pas vous le dire avec précision mais on peut être sûr que ni l’Assemblée Nationale, ni le Sénat ne pourront protéger les dirigeants actuels et notamment le Président de la République. Par ailleurs, les militaires et autres forces de l’ordre les protégeant aujourd’hui n’hésiteront pas à changer de camp s’il le faudra.

Actuellement, la communauté internationale ne veut plus entendre parler de coup d’Etat mais peut-on réellement éviter cela si on souhaite des changements concrets ?

A l’heure actuelle, une énorme campagne publicitaire incitant la population à arrêter les coups d’Etat est diffusée à travers plusieurs médias. Mais quand les perroquets des étrangers sont au pouvoir, faut-il vraiment arrêter les coups d’Etat ? Où sont donc les intérêts de la population, le pouvoir d’achat, les droits et surtout la souveraineté ? Madagascar a besoin d’une réelle et totale indépendance et ne doit pas être colonisé jusqu’à l’éternité. 2016 sera l’année de la libération pour Madagascar et on ne s’arrêtera pas tant que les Malagasy ne seront pas formellement indépendants. Tous les biens des malgaches doivent être rendus, tout ce qui a été vendu comme les îles Eparses, les sociétés d’Etat, l’argent et les autres richesses.

Une vraie et totale indépendance, n’est-ce pas une utopie compte tenu du fait que nous ne l’avons jamais été même après  26 juin 1960 ?

C’est faux. Le pays a eu son indépendance mais on l’a volontairement appauvri. On a toujours tout fait pour que les Malagasy deviennent et restent des mendiants. Lorsque la France nous a fait choisir de rester ou non au sein de la communauté française, on nous y a tout simplement obligé. La communauté française, les francs maçons, la francophonie ou le pacte de responsabilité sont tous des termes de colonisation mais le jour viendra où le pays va se libérer de cette colonisation moderne. Je répète que 2016 sera l’année de la libération de Madagascar mais aussi des autres pays africains encore sous l’emprise de la colonisation.

En fait, c’est la plus grande crainte de la France : nous voir libre et entraîner les autres pays dans notre élan. C’est la raison pour laquelle des délégations françaises sont envoyées ici et là pour s’ingérer dans les affaires de l’Etat ou que le sommet de la Francophonie se tiendra à Madagascar.  Cet évènement n’accorde absolument aucune considération au peuple malagasy. Et si cela continue, le peuple sait ce qu’il doit faire et on verra si le sommet sera fait ou pas.

Laza Marovola