Une grande émotion dans le monde de la presse a accueilli l’annonce pour la fin de l’année, du dernier numéro de Newsweek version papier. Ce choix de la direction de ce prestigieux hebdomadaire américain qui a connu ses beaux jours avec des tirages de trois millions d’exemplaires, non seulement remue sentimentalement le lectorat mais interroge la profession sur l’avenir du « journal papier ». La question se pose avec pertinence, mais un grand nombre d’entrepreneurs de presse au contraire s’en frotte les mains. 
L’irruption des informations sur le Net sous différentes formes d’exploitation a provoqué nombre de réflexions et ouvert bien de débats sur l’avenir de la presse imprimée. Cette stratégie adoptée aujourd’hui par Newsweek en réponse à des nécessités de gestion, ne correspond pas nécessairement à un glas pour l’ensemble du secteur, et des concurrents y lisent même l’opportunité d’une part de marché à conquérir. Personne ne s’autorise à minimiser le rôle et la place accaparés par le numérique dans le monde médiatique, mais suite aux premiers chocs qui ont bousculé et la donne et certaines habitudes, sans qu’il n’y ait eu besoin d’une convention formelle pour un modus vivendi, entre les assauts des technologies nouvelles et la résistance du classique papier, s’est installé un autre ordre. En un tout autre domaine, mais voisin quand même, l’exemple du cinéma qui a survécu donne matière à croire à une possibilité de coexistence entre nouveauté et méthode installée. La diffusion des films par la télévision et leur lecture en privé grâce à du matériel démocratisé ont abouti à donner une nouvelle vigueur à l’industrie cinématographique tout en faisant place à un artisanat producteur de réalisations de bonne facture autant que de navets. 
La profusion des infos sur support numérique attire autant qu’elle noie le lecteur. Le support reste du domaine virtuel or les études tendent à convaincre du  besoin d’un support matériel que réclament les consommateurs en fonction des moyens qu’ils peuvent y mettre. Face à la gratuité de l’accès aux infos en ligne qu’offre un bon nombre de prestataires, les entreprises de presse ont imaginé différentes formules pour organiser la résistance. Les « gratuits » spécialisés dans les petites annonces à leur début ont tracé avant l’heure la voie aux journaux gratuits généralistes d’informations. La formule fait ses preuves mais nécessite un schéma de distribution adapté. L’utilisation du papier recyclé a tenté aussi de donner une autre réponse à la nouvelle donne, mais dans les pays avancés les consommateurs ont des exigences que ne peut toujours satisfaire la qualité offerte par le recyclage du papier. 
La donne diffère certes selon le niveau d’avancée de chaque pays, aussi les bases sur lesquelles s’appuie la matérialité, varient. Cependant il est des constantes qui s’imposent, ainsi même dans les pays à faible pouvoir d’achat la « clientèle » rechigne à consommer un recul de qualité, celle-ci en rapport de ce qui a été évidemment. 
En ce qui concerne Madagascar, la multiplication des titres de la presse montre les potentialités d’une réserve de lecteurs et le dynamisme que nécessite la conquête d’une part de ce lectorat. La concurrence entre « papier-journal » et « infos en ligne » se manifeste pareillement, puisque l’une et l’autre de ces formules non seulement s’adressent aux mêmes catégories sociales, mais s’appuient sur les mêmes ressources que sont les annonces. Dans les infos en ligne on relève des manœuvres incessantes, un concours permanent entre sites : c’est à celui qui séduirait le plus les visiteurs, en quête d’infos, mais à la fois sensibles au charme de la présentation, à la sympathie de l’accueil, à la fonctionnalité d’y naviguer à travers les rubriques. Et ça bouge dans le secteur ! La presse-papier s’oblige à y puiser un motif supplémentaire de redoubler de dynamisme.

Léon Razafitrimo