En fin d’exercice, les données sont compilées pour essayer d’estimer le chemin parcouru qui, habituellement dans l’esprit de l’être humain, est imaginé comme des pas réalisés vers l’avant et non comme une marche à reculons. Pour le cas de Madagascar, il s’agit de ni l’un ni l’autre mais plutôt de précipitation vers l’abîme, ou en quelque sorte de saut dans le vide et sans parachute, si on en juge aux dernières statistiques sorties des différentes études mondiales. Et c’est bien le cas de le dire puisque les recherches et les analyses sont faits des organisations internationales, par conséquent, le doute n’est pas permis.

Sur le volet corruption d’abord, on figure dans le bas du tableau. A peine si on a dépassé des pays africains considérés depuis la nuit des temps comme antres des ténèbres où tout s’achète et où tout se vend : armes, richesses naturelles, services, administrations, … et même père, mère et enfants. En tout cas, non seulement, le pays n’a pu tenir compte des leçons, recommandations et classement de l’année précédente mais a perdu en même temps quelques places.  Evidemment, toutes les autres Nations sensées ont fait plus attention pour trouver ou retrouver de meilleures positions. Mais le secteur électricité a fait énormément parler de lui et  ce n’est pas faute de ne plus pouvoir se rappeler du temps passé mais cette année, le délestage a été plus que sévère. Aux dernières nouvelles, l’infrastructure de la sous-agence de la Jirama à Ambohipo est victime de jets de pierre de la part des habitants de ce quartier à chaque coupure d’électricité. Ce n’est qu’une manifestation, parmi des milliers, de la colère de la population puisqu’ailleurs, on brûle et on met à sac tout simplement ces locaux. C’était le cas par exemple, à Soanierana Ivongo, à Morondava, à Mananara Nord, ou encore à Marolambo. En même temps, les statistiques mondiales sur l’utilisation de l’énergie mettent le pays en très mauvaise posture : plus de 70% des foyers à Madagascar n’ont pas accès à l’électricité. Facilement, on peut transposer cette donnée sur toute l’étendue du territoire avec le paramètre de densité géographique pour arriver à la conclusion que le noir couvre plus de 90% de la Grande île. Effectivement, on enregistre une très forte proportion de la population dans le milieu rural, à savoir 80%, et le reste est réparti dans quelques grandes villes. Pour un total de 23 millions d’habitants, le dixième se trouve dans la Capitale, là où on vit quotidiennement avec 3 à 4 heures de délestage par jour. En ce qui concerne l’énergie moderne, à comprendre le mélange entre les énergies nouvelles – soleil, vent, eau, carburant vert, … -  et les centrales à fuel, c’est encore des informations qu’on lit dans les magazines ou qu’on obtient à la télé. En somme, les Malgaches s’éclairent toujours avec « Ingahibe Masoandro » et toute vie s’arrête dès la nuit tombée, comme il y a quatre ou cinq siècles. Si jamais des chercheurs étrangers s’avisent à créer un classement sur ce volet, à coup sûr, Madagascar va, encore une fois, être parmi les derniers et les Malgaches parmi les peuples les plus … diurnes du monde. Mais de toute façon, la population a bien raison d’oublier la vie nocturne à cause de l’insécurité. Et sur ce point, notre pays sera aussi parmi ceux où on recense le plus grand nombre de vols de bétails, de vol à la tire ou abrite le plus grand nombre de dahalo, de pickpockets, et de membres des forces de l’ordre ripoux.

En tout cas, l’on figure dans les 5 pays les plus pauvres de la planète et on sait aussi que plus de 95% de la population vivent avec moins d’un dollar par jour. Normal ainsi si nous sommes  champions du « Kere » et mangeurs de « voan-draketa ». En opposition à tout cela, nous sommes aussi le leader en braderie de nos richesses nationales : bois de rose, or, pierres précieuses, et même terre rare et grandes surfaces de terres fertiles que nous n’octroyons qu’aux étrangers. A l’allure où vont les choses, il ne restera plus au peuple malgache que les lacs Anosy et Behoririka, ainsi que les régions arides de l’Androy où on sera traité comme les aborigènes d’Australie ou les Indiens d’Amérique du Nord : parqués dans des jungles – comme le cas de Calais en France -, camps et ghettos, dont les … « frontières » seront matérialisées par des clôtures de hauts murs surmontés de barbelés !

Tout cela sera facilement réalisable, d’ailleurs Madagascar est actuellement le 3ème pays le plus cancre au monde. Selon l’indice mondial de la créativité 2015 – encore un indicateur de performance – qui vient de sortir à la fin du mois dernier, on  se trouve, non dans le peloton du fond mais carrément parmi les trois derniers pays et classé 137ème sur 139 nations. On a juste dépassé le Ghana à la 138ème place, donc  l’incontestable nul de continent noir, ou plus précisément, le cancre des cancres de l’Afrique ; et l’Irak, un pays en guerre depuis plus d’une décennie. Pour arriver à ce résultat, les chercheurs de Martin Prosperity Institute de l’université de Toronto ont formé un « index de créativité globale » (CGI) composé de ce que l’étude appelle « les trois T », à savoir  technologie, talent et – curieusement- tolérance. Le premier niveau est déterminé par les niveaux d’investissement en recherche et développement, ainsi que le taux de brevets par habitant si le critère « Talent » est calculé selon le capital humain employé à des postes créatifs dans les domaines informatiques, mathématiques, scientifiques, mais aussi l’architecture, l’ingénierie, l’éducation, la formation, les arts, les médias, les divertissements, le sport, la gestion, les affaires, la finance, le droit et la santé. En d’autres termes, tout ce qui n’est pas « manufacturier ». Il est aussi calculé à travers la part de diplômés de l’enseignement supérieur dans la population totale d’un pays. Malgré la vaste étendue du champ d’activités, nous n’avons obtenu que ce piètre résultat.

Bref, on ne récolte que des mauvaises notes sous ce régime.

Jean Luc RAHAGA