Sans bookmakers (baraques et boutiques pour enregistrer les mises) l’opinion se paie une bonne tranche à l’occasion d’un pari gratuit, le pronostic sur le chiffre des organisations politiques qui parviendront à franchir l’arrivée de l’officialisation. Le spectacle est désolant, mais pour une fois où l’on peut se payer la tête de la classe politique, il n’y a pas de raison de s’en priver, après tout, elle en a fait voir de toutes les couleurs à la population, une occasion de rire dans un horizon si morose ne peut faire du mal. 
Les embûches ne font pas de ces démarches en vue d’obtenir un statut légal un véritable « parcours de combattant ». Mais que de tocards parmi ces prétendus partis politiques qui n’ont simplement fait que bluffer le public, usurpant de l’aura le temps du provisoire jusqu’au délai limite fixé par la loi. C’est que la loi judicieusement définit les conditions auxquelles sûrement nombre de ces groupuscules autant prétentieux que malhonnêtes se savaient à l’avance incapables de satisfaire, disqualifiés au départ ne les a pas empêchés de mettre à profit ce temps intermédiaire pour à la fois paraître et obtenir des miettes. Il vient à l’esprit du public des tas de noms parmi ces gens qui s’y croient pour faire croire en tenant des discours parfois autant bien agencés dans le style que spécieux et vides dans le fond. 
Ce nouvel épisode renvoie une fois encore aux fondamentaux de la professionnalisation, les accidents et les improvisations ne suffisent pas à faire d’un amateur un pro. Même si d’aventure on tombe par accident dans une bassine spécialisée, que d’efforts de nuits blanches en perspective avant de boucher les trous, avant de combler les vides, avant de pouvoir prétendre donner le change. La « chose publique » ne fait pas exception, et si l’aptitude à la réflexion et la sagesse qui peut en découler, demeurent les qualités essentielles en ce domaine, cette sagesse même enseigne la retenue et l’humilité en toutes matières et particulièrement dans celles sur lesquelles on a fait l’impasse. Certes on n’organise ni examen ni concours pour ces postes, dans un système de démocratie on s’en remet à la perspicacité du peuple pour faire ce choix. A l’évidence l’absence de cette qualification par les urnes handicape le parlement actuel. Les membres des deux chambres ne possédant pas cette onction populaire, ne sont que les émanations de vagues organisations ou plateformes politiques qui pour certaines n’ont d’existence que virtuelle. 
Les circonstances promettent à une recomposition : les membres des « partis » rayés des listes en raison de l’impuissance de ces organisations à se conformer à la législation, vont tenter de s’accrocher en s’élançant de branche en branche : du spectacle en perspective dans des ralliements contre nature. On ne peut s’attendre à des promotions à la finale de ce ballet : chaque individu tiendra le rôle dans un registre où il a excellé. Si au théâtre les rôles dits des « utilités » ont leur importance surtout dans les pièces de bouffonnerie ou de marivaudage, autant le recrutement annoncé pour l’arène politique ne mettra pas non plus à la rue les talents marqués d’un sens de courtisanerie voire de servilité afin que ces partis après avoir satisfait aux critères, réussissent à s’imposer grâce au challenge du nombre.


Léon Razafitrimo