A bien y réfléchir, malgré les critiques acerbes dont sa remise à demain de l’annonce pour rendre publique sa décision relative à sa candidature aux présidentielles, on aurait tendance à donner raison à Andry Rajoelina. Durant cette période de fête la population ne se fera pas prier pour faire abstraction de ce suspens. Le cas contraire aurait pu créer une effervescence sans garantie d’être saine. Que le Président de la Transition annonce qu’il va se présenter ou qu’au contraire qu’il va s’en abstenir, le public accueillera différemment sa décision. La population sera partagée en deux, deux tendances pas nécessairement égales en force, dans l’opinion, quelle que soit la décision, les commentaires se fractionneront en effet entre dithyrambes et critiques acerbes avec toutes les nuances intermédiaires entre les extrêmes. Qu’il s’agisse là d’un essentiel du point de vue de ses partisans, ou d’un détail vu par les détracteurs, le principal était d’épargner de perturber davantage l’atmosphère suffisamment chargée.
C’est que la population va faire la fête, avec pas grand-chose ou presque rien peut-être, mais les gens ont besoin de vivre au moins en paix leurs difficultés, ça serait déjà la fête pour eux. 
Evidemment que les polémiques autour de ce nouveau délai que s’autorise Andry Rajoelina vont occuper un peu les loisirs et débats dans les épi-bars, mais au moins ils ne se feront pas martel en tête à propos d’une décision arrêtée. Pour l’instant chacun a tout loisir d’imaginer l’hypothèse qu’il caresse de ses vœux ou celle qu’il rêve de fustiger, alors que dans le cas contraire il ne se serait plus agi de fantasme mais de regarder la réalité face à une donnée. 
C’est que l’avenir préoccupe aussi les petites gens, et ils y réfléchissent plus que ne le croient souvent les personnes des classes sociales supérieures. Les populations « d’en bas », dans leur réflexion procèdent sans doute différemment mais elles aboutissent souvent à des conclusions frappées au coin du bon sens, des conclusions que l’exploitation de leur situation de dénuement parvient parfois à pervertir. C’est que dans des schémas de survie la solution de l’immédiat prend souvent le dessus sur les préoccupations d’avenir. Malicieux en présence des politiciens ils jouent sur les deux tableaux, ne méprisant pas les petits cadeaux qui aident le présent sans marquer un réel dédain pour les promesses de demain, malice pour ruse les politiciens souvent ne s’en laissent pas conter et les nourrissent d’une main et les caressent avec l’autre. A ce jeu du à malin malin-et-demi il y a fatalement un perdant. Les rôles peuvent changer un jour ou l’autre, les gens simples finiront par en prendre de la graine et se faire leur l’adage « un homme averti en vaut deux ».

Léon Razafitrimo