Le président du Zimbabwe aura 100 ans dans 8 ans. S’il est toujours vivant, il aura battu, dans tous les domaines, tous les records de longévité retenus  par le Guinness Book, mais déjà, il est le plus âgé de tous les chefs d’Etat d’Afrique et, tenez-vous bien, du monde en exercice ! Même le nouvellement élu président de la Tunisie vers la fin de l’année 2014, Béji Caïd Essebsi est né deux ans après Robert Mugabe, c’est-à-dire, en 1926 si l’ancien chef de guérilla de l’ancienne Rhodésie du Sud, appelé aussi « Père des … indépendances ! »,  est né en 1924. Pas plus loin de ces années suscités, Madagascar a son … Albert Zafy, « père de la démocratie » qui est né en 1927 si le célèbre « père de la révolution socialiste » est né en 1936. Malheureusement pour les malgaches, ces deux anciens présidents de la République sont tout simplement des « dinosaures », inconsommables aux futures élections présidentielles, si les mauvaises langues parlent plutôt de désormais impropres à la consommation. D’ailleurs, le premier s’est abstenu de participation à toute joute électorale depuis plus d’une dizaine d’années tandis que le deuxième aime bien provoquer le monde politique malgache sans plus avoir vraiment le cœur à diriger le pays. Dernièrement, Didier Ratsiraka a sorti un livre qui a fait ressortir de la mémoire des pans de la vie de notre Nation qu’on aurait aimé oublier. Dans notre pays, ils sont les aînés et tous les respectent en tant que tel, d’autant que les errements et les erreurs des tenants de pouvoir actuels plaident en leur faveur comme des dirigeants sages et soucieux de leur peuple.

Pour en revenir à Robert Mugabe, il a dans ses compteurs presque 30 ans de pouvoir cette année -  s’il occupait le fauteuil du premier ministre 7 ans auparavant – et son règne était surtout marqué sur le plan humain par le renvoi de tous les fermiers blancs de son pays. Il faut savoir qu’avant d’être le Zimbabwe, son pays s’appelait la Rhodésie du sud si l’autre moitié du nord se nomme actuellement la Zambie. La plupart de ces fermiers ont été expropriés de leurs terres sans aucune autre forme de compensation dont une dizaine ont  été assassinés et le coup a été réalisé par des milices composées de pseudo « anciens combattants pour l’indépendance ». L’exode des fermiers blancs a été suivi par celui de 3 millions de noirs. Toujours sur ce plan, l’opération « Murambatsvina » – littéralement ; chasser la saleté – a fait expulser de Harare, la capitale de ce pays, près de 700 000 personnes sans avoir d’autre lieu pour se loger et ceci afin d’assurer la sécurité de la capitale, selon les termes officiels du régime !  On a alors assisté en 2005 à la destruction de plusieurs quartiers qui avait surtout voté pour l’opposition. Justement sur le plan politique, il n’y a plus d’opposition au Zimbabwe puisqu’institutionnellement d’abord, il n’y a qu’un seul parti : la Zanu dont il est le seul et unique maître. Et puis, les élections parlementaires se passent toujours dans un climat de violence mais surtout, Morgan Tsvangirai, le président du parti de l’opposition, est plus que souvent arrêté et subit diverses tortures, même durant la période entre 2009 et 2013, où ce dernier occupait le fauteuil du premier ministre. Bien sûr, Robert Mugabe bénéficie du soutien sans faille de la police et de l’armée ainsi que d’un système élaboré de clientélisme assorti de campagnes de répression ou d’intimidation des partis rivaux. Mais surtout, c’est un … doux dictateur aux yeux de la communauté internationale qui, l’année dernière, a inondé de financement ce pays.
Mais le Zimbabwe détient aussi d’autres records jamais égalés jusqu’ici : l’ancien grenier à maïs de l’Afrique australe a connu une hyperinflation annuelle proche de 165 000 % où quatre adultes sur cinq sont au chômage, et où les magasins vides, les pénuries alimentaires et énergétiques à répétition ont fait que l’espérance de vie a dégringolé à 36 ans ! Soit le tiers de l’âge actuel de Robert Mugabe. Sur le plan des relations internationales, le président zimbabwéen qui est qualifié par le Réverend Desmond Tutu de « caricature de dictateur africain », est le seul chef d’État africain à n’être pas invité par la diplomatie française au sommet France-Afrique de Cannes, qui s’est tenu en 2007. En effet, il était interdit de voyage sur le sol de l’Union européenne et sur le sol américain depuis plusieurs années, en raison de ses violations des droits de l’homme. C’est bien le cas de le dire puisqu’il a muselé l’opposition, a mis fin à la liberté de la presse et a fait assassiner des journalistes. Bref, aucun président de l’île continent qu’est Madagascar, n’arrive à la cheville de ce président qui figure dans le Top 5 des grands dictateurs du monde, même s’il est vrai que beaucoup de malgaches ont constaté ces derniers temps un penchant évident pour ces genres d’absolutismes chez nos dirigeants actuels.
Lorsque Mugabe a voulu devenir le président de l’Union Africaine en 2015, Madagascar, où plus exactement, la délégation malgache venue à Addis-Abeba, n’a émis aucune réaction négative. Cela n’aura pas été le cas du temps de Ratsiraka puisque ce dernier l’aurait pris comme une insulte au peuple africain. Mais cela est passé pour la simple raison que la ligne de la diplomatie actuelle de Madagascar ne comprend rien aux enjeux politiques qui se déroulent sur le sol du continent africain. Sur ce volet,  les dirigeants malgaches ont beaucoup à apprendre et devraient s’y mettre dès maintenant pour ne pas rester indéfiniment spectateurs. Et ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres.

Jean Luc RAHAGA