Comprendre comment Madagascar, quatrième plus grande île du monde, s’est appauvrie si vite en temps de paix et après la décolonisation constitue un cas d’école et un sacré casse-tête pour un économiste. La question qui se pose est la suivante : comment en est-on arrivé là ? C’est avec la décolonisation du pays que débute l’histoire du déclin économique de l’île. Au début des années 1970, la France laisse derrière elle une puissante économie fondée sur un réseau de communication important qui sillonne l’ensemble du territoire, un tissu d’entreprises des secteurs primaires et secondaires, un système efficace d’électrification de la plupart des grandes villes, des centres de santé et d’éducation. A cette époque, Madagascar est considérée comme « la perle de l’océan Indien », loin devant La Réunion et l’île Maurice. Depuis, mille kilomètres de routes vont disparaître par année. Pourtant, Madagascar est riche de mille ressources : tous les produits agricoles poussent sous des climats extrêmement variés, le pays possède une faune et flore uniques au monde, propices au développement du tourisme, et le sol renferme des trésors minéraux. Parmi ceux-ci, le nickel, le charbon, le quartz, les pierres précieuses et semi-précieuses, l’or et même le pétrole. Sans parler des milliers de kilomètres de côtes offrant aux filets des pêcheurs du poisson en abondance. Ici, c’est vers des hommes politiques, leur manque de volonté de changement, leur soif de pouvoir et leur capacité à détourner des fonds à grande échelle qu’on trouve l’explication de la déshérence économique de Madagascar. Après avoir parcouru ces quelques lignes d’un guide de voyage bien fourni de 464 pages sur Madagascar, le touriste n’aura pas de mal à comprendre pourquoi le pays est aujourd’hui l’un des pays le plus pauvre du monde. Mais le citoyen malgache peut aussi se rendre compte qu’à cause de ses dirigeants, il est littéralement dans la merde et ne possède aucune porte de sortie pouvant le sortir de là. Le pays avait tous les atouts et possèdent encore des atouts conséquents et vitaux pour son redressement économique mais les hommes au pouvoir les exploitent pour leur intérêt personnel. Les quelque 25 millions de malagasy ne tireront jamais bénéfice ni du bois de rose qui pousse sur leur territoire ni du pétrole qui dort sous les îles dans le canal du Mozambique. Madagascar est un pays d’avenir et le restera sans doute encore pour les années à venir parce que les dirigeants ignorent complètement le principe de redevabilité. La gouvernance du pays est dictée par les intérêts particuliers et les visées hégémoniques ne prenant pas concrètement en compte la population et la lutte contre la pauvreté. Tous les individus qui se sont succédé à la tête de la Grande île ont été contaminés par le pouvoir, capable de transformer un ange en sacré diable. L’actuel président de la République n’a pas échappé à la règle et n’est donc pas en mesure de stopper la chute du pays vers les fins fonds de la déshérence économique. Au contraire, il ne fera qu’empirer la situation de Madagascar et il n’y peut rien. C’est pour cela que 2014, la première année de son mandat est associée au plus gros volume de bois de rose exporté illégalement avec 12 000 m3. Mais jusqu’à aujourd’hui, les arrestations des trafiquants importants ont été quasi-inexistantes. Rien d’étonnant alors à ce que Madagascar brigue la première place des pays les plus corrompus en Afrique. Si on parle souvent de mauvaise gouvernance, la situation  prévalant dans le pays depuis des décennies renvoie à l’image de dirigeants expédiant juste les affaires courantes pour se concentrer sur le moyen de s’enrichir grâce au pouvoir qui leur a été confié par la population. Les citoyens sont les premières victimes de ce fonctionnement pervers et payent le train de vie mais assurent aussi la retraite des dirigeants. Personne ne sait combien d’années encore cette injustice continuera mais le fait est qu’il appartient au peuple d’user de sa souveraineté au moment venu.

Laza Marovola