Naturellement l’électeur normal, si tant est qu’il en reste des spécimens de cette catégorie, accorde sa sympathie au candidat dans lequel il s’identifie le mieux. Chacun quelque part dans son inconscient ou même de façon consciente berce l’idéal d’action à entreprendre en se disant « si j’étais président ». Cette longue crise avec toute la kyrielle de difficultés et toute la litanie de restrictions qu’elle a provoquées, a raboté le niveau de l’idéal et a fini par ramener celui-ci aux essentiels basiques de quoi mieux survivre en ce qui concerne une grande partie de la population. Il reste évidemment une classe minoritaire ayant mieux résisté au choc de l’épreuve, qui, en l’ayant hors de l’eau, peut garder la tête froide pour effectuer le choix de son bon président. Pas moins que les candidats, les électeurs répondent le plus souvent à une inclination égoïste et on ne peut les en blâmer. Question épineuse pour les états-majors de campagne, l’identification de la somme des égoïsmes à flatter en discours et par des gesticulations. Plus que jamais soulager des effets des multiples restrictions l’immédiat des plus défavorisés aiderait à recueillir une cote de faveur auprès de ceux qui souffrent sinon d’une faim chronique du moins qui ne mangent jamais à satiété. Ce n’est pas leur voix que l’on achète, on se contente de caresser leur nombril pour provoquer un simple réflexe de reconnaissance du ventre. La méthode ne garantit pas toutefois d’un résultat mécanique, c’est que la durée prolongée de la crise a donné le temps aux plus défavorisés de se familiariser aux difficultés et même à certains de tutoyer la misère, au point tel que certains ont acquis les ruses de résistance utiles à survivre. Les petits cadeaux n’entretiennent pas nécessairement l’amitié, ils ne constituent pas plus un geste de solidarité, nombreux miséreux considèrent les « générosités sociales » qu’ils ne se privent pas d’accepter, comme des gestes destinés à entretenir la pauvreté et à encourager les pauvres de s’y résigner. De plus en plus nombreux sont ceux qui prennent ainsi la mesure de l’aumône que leur font les grandes bonnes âmes. Seulement ventre qui a faim n’a pas d’oreilles, et c’est là que les candidats à la recherche des points sensibles essayent de trouver une planche de salut. Afin de mieux s’assurer du bénéfice du suffrage du lendemain, après avoir acquis une sympathie de l’immédiat pour avoir apaisé la faim du jour, pourquoi s’arrêter en si bon chemin et dans l’euphorie factice partagée pour quelle raison se priver de se bercer d’illusions. Les promesses, prend-on l’habitude de répéter, comme pour les excuser, n’engagent que ceux qui les écoutent. Et pourtant elles ne sont pas innocentes que ça sur la personnalité de ceux qui les disent. Pour peu ceux-ci finissent par y croire, et versent rapidement dans la mégalo qui les guette. 
De l’autre côté de la rue, chez les « bobos », chez leurs clones et dans toute la cohorte du style, on entend évidemment les échos de ces discours populistes dans lesquels les candidats rivalisent de démonstration de leur talent d’hypnotiseur et de leur don de magnétiseurs. Il y a à ce qu’il parait des habitudes qui rendent sourd, en l’espèce ici ce genre de pratique menace de rendre schizo. On en a fait l’expérience de plus d’un exemple, dans le genre de ceux qui pour avoir promis des miracles, sans avoir réussi  la moindre opération  magique, ne se sont pas privés de se croire investis d’une infaillibilité de surdoué en tout domaine.

Léon Razafitrimo