Nos aïeux avaient un proverbe qui disait « ny hevitry ny maro mahataka-davitra » ou littéralement de la concertation de la multitude résulte les bonnes idées. C’est autant valable dans la vie quotidienne qu’en politique, et le développement d’un pays est tout simplement l’affaire de tous. En Angleterre est née au XVIIIème siècle l’idée d’opposition loyale, constituée par le parti qui aura perdu les élections. Cette opposition loyale a été instituée pour que ce parti puisse continuer à s’exprimer sans avoir peur d’être accusé de trahison. La seule règle à suivre était que celle-ci devait respecter les principes et intérêts du parti au pouvoir. C’est ce qui se fait dans les pays qui se veulent démocratique car « les démocraties performantes comprennent les avantages de laisser la diversité des voix s’exprimer et de créer un espace pour la dissension. ». Ce qui garantirait la représentation de la totalité des électeurs d’ailleurs. Malheureusement,  cela, nous ne l’avons pas encore compris à Madagascar.

L’univers entier veut qu’il y ait un équilibre, un équilibre entre le bien et le mal, le jour et la nuit, la vie et la mort. Ainsi, le principe du pouvoir et de son « alter ego » devrait donc être vital pour la bonne marche des affaires de l’Etat. Le problème, heureusement, ne concerne pas uniquement Madagascar mais semble toucher le continent africain en entier, à quelques exceptions près. En effet, les recherches ont abouti à la conclusion suivante : beaucoup de pays africains, au lendemain de l’indépendance dans les premiers temps des années 1960, ne jugeaient une opposition loyale ni importante, ni désirable. L’idée était plutôt qu’on ne pouvait construire un pays que si tout le monde était du même bord. Une même tête pour réaliser un même objectif à travers une même conception des choses sans aucune discussion, ni remise en cause possible. Une idée qui semble dans un premier temps fondée mais qui au fond  est totalement fausse. Car en premier, l’opposition doit servir de contre-pouvoir qui devra veiller à ce que la majorité arrivé au pouvoir ne soit pas tentée de jouer aux intouchables. D’ailleurs, la Constitution elle-même veut qu’il y ait une opposition d’où les dispositions pour la mise en cause de la responsabilité gouvernementale devant l’Assemblée nationale par la motion de censure, la saisine de la Haute cour constitutionnelle ou encore les questions posées au gouvernement dans les enceintes parlementaires. Ensuite, l’opposition est le signe, la marque indélébile que l’alternance politique est une possibilité et une réalité. Elle est la preuve vivante du pluralisme politique. Pluralisme qui garantira la possibilité d’un vote pour les électeurs, le choix politique des électeurs. Il n’y a de choix véritable que si l’électeur peut se prononcer entre plusieurs possibilités. Ainsi, l’opposition, en proposant un nouveau cours à la politique nationale, permet aux citoyens éventuellement mécontents de disposer d’un recours. Dans les pays qui se prévalent être démocratique, l’opposition est donc essentiel et comme chez nous, nombreux lui ont accordée un véritable statut. Il est donc démontré que l’opposition est un rouage essentiel dans la pratique politique et en cas d’absence, laisse un vide considérable dans le système politique du pays.

L’une des causes premières de l’instabilité politique à Madagascar réside dans le fait qu’il n’existe point d’opposition formelle jusqu’à l’heure. Certes, il y a ceux qui s’érigent contre le régime mais qui n’osent même pas assumer ce rôle de peur de ne pas pouvoir toucher une part du gros gâteau qui résulte de la pratique de la politique. Le fait que chacun critique dans son coin et non dans un cadre institutionnel bien défini ne favorise en rien la stabilité politique. Or, une vraie opposition se doit d’être légitime, constructive et responsable. Selon Nelson Mandela, « une opposition loyale force le parti majoritaire à être responsable devant le peuple. », et bien oui, c’est le cas. Ne faisons donc pas semblant d’être indignés lorsque le régime n’en fait qu’à sa tête et mène à lui seul la danse, dispose du pays comme un bien acquis. Car voilà deux ans et demi que l’on a fait appel à l’opposition sans obtenir aucune réponse, que des murmures et cris dans le désert. Comme on l’a dit et redit maintes et maintes fois, le redressement de ce pays embourbé dans les querelles politiques et les déviances du pouvoir est l’affaire de tous. Les premiers à être concernés sont les partis d’opposition. L’opposition n’est pas un second rôle, tout au contraire, il s’agit de personnes fidèles aux valeurs qu’ils ont défendues et responsables vis-à-vis de toute la Nation. Le mot de la fin sera emprunté à la candidate de l’opposition Nana Konadu Agyeman-Rawlings au Ghana : « C’est notre devoir patriotique, en tant que citoyens  de ne pas laisser la moindre place à la complaisance du gouvernement. ». Aussi, à l’endroit de nos dirigeants : « Si vous voulez vraiment que votre héritage soit celui d’un bon dirigeant, bâtissez des institutions qui donneront à chaque groupe de votre pays l’occasion de participer à la gouvernance. »

Ny Aina Rahaga