Comme pour avoir tiré le numéro gagnant au loto après avoir plusieurs fois essayé sans trop de chance, ou en espérant juste que la chance nous sourit pour une fois, on se dit que « cette fois, c’est la bonne ». Et bien oui, on dirait bien que ce sera le cas cette fois-ci. Après avoir entretenu la rumeur d’un coup d’Etat et attendu le moment fatidique comme celui du jugement dernier, il semble que le régime en soit arrivé à l’épilogue de son histoire, à la fin du récit. En tout cas, on parierait plus sur la victoire du Portugal à l’Euro dans quelques heures que sur le maintien du régime actuel même pour quelques mois encore. Beaucoup trop de faux pas et énormément de maladresse, mais aussi un culte de la personne qui n’a eu son pareil dans l’histoire. Et ce, multiplié avec une fracture sociale sans précédent et des magouilles impardonnables. Voilà ce qu’il en résulte de tout cela. Une lutte, une guerre jusqu’à la mort entre le pouvoir et le peuple, du style les 300 spartiates qui défendront coûte que coûte leur patrie. Car nombreux sont ceux qui ont manifesté et démontré leur soutien pour les actions à venir comme pour la radio « miara-manonja » ou encore pour la marche de l’enterrement de la liberté.

D’un autre côté, tous les alliés du régime se sont écartés petit à petit, voyant la fin proche. A l’image de ce ténor du parti Hery Vaovao ho an’i Madagasikara, qui a fini par suivre la voix de la raison. La raison, voilà ce qui manque cruellement aux tenants du pouvoir actuel. A un point où ils hypothèquent le sol et le sous sol à travers des investissements miniers qui n’apporteront que 1% ou au maximum 2% de redevance dans les caisses de l’Etat. Et même les cieux malgaches en les ouvrant à des compagnies low-cost alors que la compagnie nationale s’est fait abattre et a énormément de mal à se relever. C’est ce manque de lucidité qui l’empêche de voir que tout le monde proteste contre ses décisions et fait fuir ses alliés comme des rats qui quittent un navire sur le point de couler. Nous ne leur donnerons pas tort, car même la communauté internationale a averti le régime sur les dangers de ses pratiques. Pour ne parler que de ce code de la communication qu’on a tenté, en vain, de faire abandonner mais que les cravates bleues veulent faire adopter envers et malgré tout. Même l’Assemblée parlementaire francophone vient de démontrer son inquiétude en insérant à la dernière minute à son ordre du jour la question de la liberté d’expression. Quid de reporters sans frontières, de plusieurs organisations de la société civile malgache.

Cette fois c’est la bonne raison pour avoir constamment peur de se faire jeter de son siège à coup de pied dans le derrière. De maintenir cette psychose en veille pour ne pas être surpris le moment venu. Le pouvoir a poussé la population à descendre dans les rues malgré elle. En effet, à force de ne rien avoir à ramener au foyer pour le dîner, les parents préfèreront descendre dans la rue réclamer et ce, pour que leurs enfants mangent. Les consommateurs, à la vue d’une inflation monstre, marcheront dans les rues, faute de ne plus pouvoir se payer un ticket de bus car trop cher pour de si petites bourses. Les journalistes et ceux qui ont l’âme de citoyen y seront aussi non pas pour faire un « coup d’Etat » comme certains se plairaient à le qualifier. Mais plutôt pour réclamer le respect de la loi, des droits et libertés universelles qu’aucun régime, aussi misérablement démocratique soit-il, n’a jamais osé écraser. Pourtant, à Madagascar, ils l’ont fait. La population entière sera dans la rue, forcée par les coupures de courant qui n’en finissent plus. Alors mieux vaut descendre dans les rues éclairées de la ville où on sera plus en sécurité avec la multitude plutôt que de rester chez soi dans le noir à attendre d’être cambriolé, violé et assassiné de la plus cruelle des manières qui soit.

Cette fois c’est la bonne, et il n’y aura pas besoin de faire un coup d’Etat ou de confronter la population à des soldats qui malgré eux tireront sur la foule. La coupe est pleine et c’est pour cela que le régime tombera comme le château de cartes qu’il est. Fragile et sans base solide, il n’y aura même pas besoin de grand-chose. Cette fois, c’est la bonne.

Ny Aina Rahaga