« Jackpot », se seraient écriés bon nombre des dignitaires du régime Rajaonarimampianina après la première journée de la Conférence des bailleurs et des investisseurs à Paris avant-hier. Car le déroulement de cette première journée était sans doute au-delà des espérances et des  rêves de chacun d’eux. « La Banque africaine de développement a battu le record de financement pour Madagascar. Lors de l’ouverture de la conférence des bailleurs et des investisseurs au siège de l’Unesco Paris, le directeur de la Bad a annoncé la décision de son institution d’accorder un financement à hauteur d’un milliard de dollars américains pour la réalisation du Plan national de développement (…) Tard dans la nuit d’hier, une information émanant de la radio nationale malagasy a précisé que le montant total des subventions obtenues a atteint les 6,4 milliards de dollars », avons-nous rapporté dans notre édition d’hier. 6,4 milliards de dollars, c’est largement en dessus des 3 milliards espérés et recherchés par les tenants du pouvoir à l’annonce de la tenue de cette conférence des bailleurs et des investisseurs. Il n’est donc pas étonnant si certains parlent de moisson de dollars après une seule journée au siège de l’Unesco.

La moisson se définit comme l’action de récolter les blés, les céréales lorsque les grains sont parvenus à maturité ; époque de cette récolte. Récolter les blés, c’est bien ça car 6,4 milliards de dollars ce n’est pas rien pour un pays comme le nôtre. Par contre, la moisson consiste à récolter ce que l’on a semé lorsque ces graines arrivent à maturité. Il est assez étonnant qu’un régime tel que celui-ci arrive encore à collecter autant d’argent auprès des bailleurs. De nombreux paramètres justifient ce questionnement et en premier le fait qu’on est face à un régime qui n’a rien semé du tout. La misère malgache n’a jamais atteint un tel niveau depuis 1960. Que ce soit la pauvreté proprement dite qui touche 92% des malgaches, c’est-à-dire ceux qui se trouvent hors des palais et des tours d’ivoire des dirigeants, ou seulement en ce qui concerne la dignité du peuple qu’il a perdu depuis. Aucune vraie réalisation concrète ne joue en faveur du régime et des tenants du pouvoir, si ce n’est les quelques infrastructures faites à la va-vite pour la réception du Sommet de la Francophonie. Quelques routes ici et là qui ont déjà été fermées, 100 millions  d’Ariary engrangés grâce au prix d’entrée au village de la Francophonie. Une somme  qui, d’ailleurs, ne  changera rien à la vie des malgaches en général.

D’autre part, l’on parle ici d’un régime en fin de vie, qui arrive au terme de son mandat avec une impopularité qui dépasse tous les records. En effet, 2017, c’est tout ce qui reste au régime actuel avant d’affronter le verdict des urnes. Pourtant, plus que jamais, les malgaches ne veulent plus entendre parler des démagogues, des menteurs, des corrompus, des trafiquants, des vendus et des soumis qui se trouvent à la tête de l’Etat. Un quotidien pro-régime avait souligné le discours du président de la République qui « s’est lancé à l’endroit des amis de Madagascar sans exception, dans un plaidoyer vibrant qui n’aura pas manqué de peser lourd dans les décisions des représentants des institutions présentes. Dès l’entame de son discours, il rassure : « Nous sommes sur la voie de la stabilité ». Depuis l’accession  de ce régime à la tête de l’Etat pourtant, le président et ses amis ne cessent d’utiliser ce même discours avec leur légendaire lutte contre la pauvreté qui n’a pas encore vu le jour à un an de la fin de leur mandat. A cela nous avons répondu hier que « si les partenaires techniques et financiers de la Grande île respectent réellement leurs promesses, le régime Rajonarimampianina n’aura plus de problèmes de financement pour la réalisation de ses engagements ». Et le fait est qu’il y a peu de chance que le régime vire de bord d’un coup et priorise les besoins du pays et de sa population. 6,4 milliards de dollars, c’est tout juste une belle épargne retraite pour ceux du régime qui s’en réjouissent déjà. Ou le moyen de briguer un autre mandat, et si cela se réalise, les observateurs prévoient une nouvelle crise et un nouveau renversement de pouvoir à Madagascar. Moisson de dollars dites-vous ?

Oussa Fémal